Leçons d’un échec Français
L’édito de l’Humanité-Dimanche (29/10)
Si le combat antiraciste a pu prendre
des chemins tortueux ou trouver parfois des alliés de circonstances, c’est qu’il
a été laissé en souffrance, et avec lui, surtout, le combat pour une égalité
véritable.
La responsabilité première incombe, et
de loin, à des choix politiques qui ont vidé la République de sa substance
sociale au profit d’un ordre capitaliste inégalitaire et autoritaire.
La République française proclame son
ambition à former une communauté de citoyens libres, égaux, et fraternels
par-delà les origines, croyances et identités, et son refus conséquent de
reconnaître en son sein des « communautés minoritaires » auxquelles l’Etat
devrait reconnaitre des droits et des devoirs spécifiques. Elle dit ainsi sa
vocation politique universelle.
Mais il est peu dire que cette promesse
est laissée en jachère par des décennies de politiques ultralibérales et
différentialistes, par l’atrophie de la souveraineté populaire et donc de la
citoyenneté, par une prétendue politique de la ville conçue pour parquer les
populations d’origine immigrées, par la destruction des institutions sociales
égalitaires nées de la Libération, par la montée instrumentalisée d’un racisme
décomplexé et la vie impossible faite aux immigrés.
Comment, dans de telles conditions,
mener à bien le projet d’intégration, non pas à une identité française
fantasmée et figée, mais à la citoyenneté qui, seule, peut permettre de définir
cette identité française de demain ?
(...)
Car il faut prendre la mesure des
difficultés qui nous assaillent.
Toutes les études disponibles indiquent
un décrochage générationnel d’une partie importante des jeunes français de confession
musulmanes vis-à-vis de la République.
Il faut d’urgence cerner les ressorts du
phénomène pour se tourner vers cette jeunesse minée par le mépris, le chômage,
la précarité, dont l’avenir n’est garanti que par les solidarités
intra-communautaires.
Les conséquences de la crise sanitaire
risquent d’ajouter une couche de désarroi pour cette génération que le
gouvernement cherche à utiliser comme variable d’ajustement du « marché » dit
de l’emploi.
Tous les efforts doivent être menés pour
leur proposer un travail ou une formation, « quoi qu’il en coûte », avec pour
objectif que de cette classe d’âge ne sorte aucun chômeur.
Ainsi ces jeunes pourront-ils échapper à
l’enfermement identitaire et religieux. Il s’agirait de mettre en œuvre les
préconisations du plan Borloo [pour les banlieues], qui fut déchiré par Macron.
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