mercredi 26 octobre 2016

L’ Humanité : 70° anniversaire du Statut général des fonctionnaires – 21 octobre 2016

1946; le statut général des fonctionnaires, un « socle progressiste' »
Le 5 octobre 1946 la deuxième Assemblée nationale constituante examine son dernier projet de loi avant le référendum sur la constitution de la IVe République. Il s’en est fallu de peu que ce texte relatif au statut général des fonctionnaires ne puisse venir en discussion avant la fin de la session. Mais un ultime accord entre le Président du Gouvernement Provisoire Georges Bidault et le Vice-président du Conseil, chargé de la fonction publique, Maurice Thorez, également secrétaire général du Parti communiste français, a tranché d’âpres débats qui n’en finissaient pas. En quatre heures, sans discussion générale, les 145 articles du texte sont votés à l’unanimité. Plus d’un million d’agents publics de l’État sont considérés comme fonctionnaires, protégés par la loi, même si seulement 47 % d’entre eux sont effectivement titularisés dans le cadre de ce statut. La loi sera promulguée le 19 octobre 1946.
C’était l’aboutissement d’une longue histoire de la fonction publique. L’Ancien Régime avait connu la vénalité et la patrimonialité des charges administratives. La Révolution française supprima ces privilèges et posa des principes d’égalité d’accès aux emplois publics et de probité des agents publics. Mais c’est une fonction publique dominée par le pouvoir hiérarchique qui prévalut au XIXe siècle et pendant la première moitié du XXe. Au point que le premier statut des fonctionnaires vit le jour sous Vichy, un texte du 14 septembre 1941 inspiré par l’antidémocratique Charte du travail. Les associations, puis les syndicats de fonctionnaires n’avaient cessé de dénoncer jusque-là les tentatives de « statut carcan » que tentaient de leur imposer les gouvernements conservateurs. Ils réclamaient un « contrat collectif ».
Une telle situation met en valeur la lucidité et l’intelligence dont firent preuve les responsables progressistes de l’époque, issus pour la plupart de la Résistance. À l’exemple de Jacques Pruja, un dirigeant de la Fédération Générale des Fonctionnaires (FGF-CGT), révoqué, arrêté, puis réintégré, qui prit l’initiative d’élaborer un premier projet de statut démocratique avec lequel il finit par vaincre les réserves qui s’exprimaient au sein même de son organisation syndicale. La FGF adopta finalement un projet de statut lors de son congrès de mars 1945. Les forces syndicales de la CGT, majoritaire, et de la CFTC prirent alors une part active dans la promotion des nouvelles dispositions. Le projet retenu par le ministre de la fonction publique suscita de très vives oppositions. Venant de hauts fonctionnaires qui admettaient difficilement le recul de l’ordre hiérarchique antérieur ; les oppositions s’accentuèrent au fil du temps de la part de la CFTC et du MRP, parti démocrate chrétien, qui finirent par élaborer leur propre projet ; ou encore de ministres socialistes de la SFIO. Le rejet du premier projet de constitution par référendum du 5 mai 1946 menaça de tout faire capoter. Mais combinant esprit de compromis (abandon de la création d’une fonction de Secrétaire général de l’administration, par exemple) et fermeté sur les principes, Maurice Thorez parvint à ses fins.
Le Statut mit dans la loi de très nombreuses garanties pour les fonctionnaires en matière de rémunération (voir en encart la définition du « minimum vital » l’ancêtre du SMIC), d’emploi, de carrière, de droit syndical, de protection sociale et de retraite. Il a été abrogé par l’ordonnance du 4 février 1959 lors de l’avènement de la Ve République. Statut fondateur, il a ainsi ouvert la voie au statut fédérateur de 1983 d’une fonction publique « à trois versants » : de l’État, territoriale et hospitalière regroupant aujourd’hui 5,5 millions de salariés du service public, soit 20 % de la population active de la France, exemple sans équivalent dans le monde. Protégés par la loi plutôt que par le contrat, le Statut général indique une voie inverse de celle de la loi El Khomri, c’est une grande référence sociale pour tous les salariés, du public comme du privé. En 2011, la CGT déclarait à ce sujet : « Dans la fonction publique, même s’il subit des attaques sans précédent, le statut général des fonctionnaires demeure un socle progressiste pour des millions d’agents et autant de garanties pour les citoyens. Le caractère unifié doit en être renforcé ». Offensives frontales ou dénaturations sournoises, les attaques contre le statut des fonctionnaires n’ont jamais cessé, ce qui lui a permis de faire la preuve de sa solidité et de son adaptabilité. Nul doute que l’on en reparlera au cours de la campagne des présidentielle.

Anicet Le Pors
ancien ministre
conseiller d’État honoraire
Pour aller plus loin lire : Anicet Le Pors et Gérard Aschieri, La fonction publique du XXIesiècle, Éditions de l’Atelier, 2015.

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